« Le Monde » a rencontré la jeune femme à l’origine de l’affaire qui a embrasé le Sénégal en mars 2021. Depuis qu’elle a accusé le leader d’opposition Ousmane Sonko de l’avoir violée, elle vit recluse et sous protection policière.
A tout juste 22 ans, Adji Sarr vit comme une prisonnière dans son propre pays. En témoignent ces trois policiers qui la suivent comme son ombre pour la protéger.
Ou ses changements fréquents d’adresse (cinq en un an) et de numéro de téléphone. Cette vie en liberté surveillée a commencé en février 2021. Le responsable crie au complot, l’affaire privée se mue en affaire d’Etat.
La jeune femme, que Le Monde a pu rencontrer à la mi-février 2022, raconte : « Tout un pays m’accuse d’être responsable de ces morts. C’est très lourd. Mais je ne veux plus rester silencieuse, je dois donner ma version des faits. »
A l’été 2020, après de longues années à travailler comme bonne à tout faire chez une commerçante, elle est recrutée par un salon de massage, le Sweet Beauty Spa, situé dans un quartier résidentiel de Dakar.
Adji Sarr assure n’y avoir pratiqué que des massages classiques – sans prestations sexuelles – jusqu’à sa rencontre avec Ousmane Sonko, qui l’aurait violée, selon elle, à cinq reprises entre juin 2020 et février 2021.
« La première fois, au moment de se déshabiller pour le massage, il a déposé ses deux armes sur une table. Cela m’a intimidée. Après la prestation, il a réclamé un “plus”. J’ai refusé. Il a insisté et m’a violée. Il me répétait qu’il serait le futur président du Sénégal et que je n’avais pas intérêt à parler, que personne ne me croirait. »